Fonds Thorez- Vermeersch
Archives municipales d'Ivry-sur-Seine

Un été en Aveyron

De gauche à droite : Paul Vaillant-Couturier, Maurice Thorez, Hippolyte Marquès et Pierre Sémard. Avant 1937.
De gauche à droite : Paul Vaillant-Couturier, Maurice Thorez, Hippolyte Marquès et Pierre Sémard. Avant 1937.

Cliché Renée Quatremaire / Fonds photographique / Archives communales d'Ivry-sur-Seine.

Hippolyte Marquès, militant communiste originaire de l’Aveyron, occupait en 1939 à Ivry-sur-Seine le poste de deuxième adjoint au maire. « Le père Hippolyte », comme Maurice et Jeannette l’appelaient volontiers, était un homme de confiance chez qui le secrétaire général, accompagné de Clément, le représentant de l’Internationale communiste, se rendait souvent, y tenant réunion, et y partageant à l’occasion un repas. Aux heures où le Parti communiste n’avait encore que peu de moyens, la disponibilité de tels militants suppléait à ces manques.

En août 1939, Hippolyte Marquès était en vacances chez sa sœur et son beau-frère, Jeanne et Joseph Septfonds, dans l’Aveyron, au village du Monastère-sous-Rodez. Joseph travaillait comme contremaître-tanneur à la tannerie Arnal, celle-là même où avait travaillé le père d’Hippolyte et de Jeanne.

Le 25 août 1939, Joseph Septfonds fut mobilisé à Millau, comme lieutenant à la D. A. T., troisième Compagnie. Le lendemain, 26 août, son beau-frère Hippolyte se mit en route pour Ivry, tandis que la guerre menaçait : elle est déclarée quelques jours plus tard, le 3 septembre. Le 5 ou le 6 septembre, peu avant midi, Jeanne Septfonds voit arriver chez elle Henri Fontaine, ivryen lui aussi, chauffeur de Maurice Thorez et ami personnel de son frère Hippolyte. Jeanne le connaissait déjà pour l’avoir reçu chez elle, deux ans auparavant. La suite des événements nous est relatée par la déclaration que devait faire plus tard Jeanne Septfonds aux forces de police :

« [Henri Fontaine] m’a demandé si mon frère était arrivé. J’ai été très surprise et lui ai répondu qu’il était parti le samedi précédent. Fontaine a répliqué : « Nous avons eu un accident à Brive. Moi, je viens par le train, et eux arrivent par une camionnette. Ils vous portent des affaires que l’on vous laissera ». Et il est sorti, disant qu’il allait à leur rencontre. Une demi-heure après, alors que tous les ouvriers de l’usine étaient déjà sortis, et que le patron, M. Arnal, était allé manger, j’ai vu entrer une camionnette de couleur bleue, bâchée, conduite par un individu que je ne connaissais pas. Mon frère était déjà descendu. Hippolyte m’a dit : « Je t’amène la bibliothèque de Thorez qui a une valeur de 200 000 francs, et qu’il ne voudrait pas voir endommagée par les bombardements ». Je lui ai répondu : « Au moins, il n’y a rien de compromettant pour moi ? ». Et mon frère a rétorqué : « Des livres ne peuvent pas te compromettre ». Aussitôt, ils ont déchargé quatre caisses et une malle d’auto, et la camionnette est allée se ranger derrière l’église. Ils ont déjeuné tous les trois, et vers 15 heures, Fontaine et le conducteur de la voiture sont partis. Mon frère a soupé à la maison, et vers 21 heures, un de mes amis, M. Gransac, comptable chez M. Constans, est venu le prendre avec sa voiture pour l’amener à la gare de Rodez, où il a pris le dernier train. »

Jeanne Septfonds déclara ensuite avoir vidé les caisses et rangé les livres dans différentes armoires. Puis elle alla brûler dans le foyer de la lessiveuse un certain nombre de journaux communistes, qui avaient servi à envelopper les livres dans les caisses. 

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