La renaissance du livre
Après la Seconde Guerre mondiale, la bibliothèque privée de Maurice Thorez et Jeannette Vermeersch connut un formidable essor : près de la moitié des 10 000 ouvrages constituant aujourd’hui cette bibliothèque furent publiés entre 1945 et 1960. La raison de cet accroissement est à chercher du côté de la profonde recomposition que connaît, à partir de la Libération, et dans un contexte d’épuration, le paysage intellectuel et éditorial français.
Concernant les éditions du parti, le Bureau d’éditions et les Éditions sociales internationales reprennent leur activité à partir de 1945 sous le nom des Éditions sociales. René Hilsum en prend la direction. Par ailleurs, en 1949, les Éditeurs Français Réunis naissent du regroupement de cellules éditoriales (La Bibliothèque française, Hier et aujourd’hui…) créées dans la Résistance par des intellectuels communistes ou proches du PCF. Aragon, puis Madeleine Braun dirigèrent Éditeurs français réunis. Les Éditions sociales et les Éditeurs français réunis vont dès lors devenir les premiers contributeurs de la bibliothèque familiale des Thorez, par le biais de leur service de presse, mais aussi en adressant au secrétaire général et à son épouse des « exemplaires de tête », premiers exemplaires sortis d’imprimerie et numérotés.
Le climat est à la renaissance morale et intellectuelle du pays, et dès 1945, le PCF lance la « bataille du livre », une vaste campagne de promotion du livre et de la lecture animée par le couple d’écrivains communistes Louis Aragon et Elsa Triolet. La bataille du livre se traduisit par un vaste effort d’édition, en volume comme en diversité des publications.
De surcroît, le bouillonnement de l’activité éditoriale et littéraire, à l’intérieur et autour du Parti communiste français à partir de 1945, est indissociable de l’attraction qu’exerce sur les intellectuels français un parti auréolé de la gloire de ses résistants, et de ses nombreux fusillés. De nombreux auteurs de littérature, de philosophie, de sciences sociales, nouveaux adhérents du parti ou simples sympathisants, adressent leurs livres dédicacés au couple Thorez. En conséquence, il arrive fréquemment que le député reçoive un même ouvrage en plusieurs exemplaires, adressés simultanément par l’auteur, l’éditeur, voire le traducteur ou le préfacier.
La bibliothèque compte aujourd’hui plus de 2 000 envois d’auteurs.
Par ailleurs, tout déplacement officiel de Thorez – ministre de 1945 à 1947 – était prétexte, pour les militants locaux, à lui offrir des cadeaux, et de notoriété publique, les livres constituaient pour le secrétaire général des cadeaux de choix. Pour son cinquantième anniversaire, Maurice Thorez reçut aussi de nombreux livres rares et anciens.